(mis en ligne 12/05/2018) Dans un tel litige, il appartient au juge administratif de caractériser une insuffisance professionnelle et à l’autorité administrative d’en apporter uniquement les preuves, lesquelles peuvent être combattues par des preuves contraires, ce qu’une autorité territoriale apprend à ses dépens…
Dans cette affaire, une collectivité territoriale avait procédé au licenciement d’un enseignant artistique en CDI, en exposant des carences professionnelles graves et caractérisées par le niveau très insuffisant des élèves lors des examens de fin de cycle en 2012 et le désengagement de l’enseignant artistique dans un projet de concert avec ses élèves.
Conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l’art. 46 de la loi du 15 févr. 1988, l’enseignant artistique est licencié pour insuffisance professionnelle et perçoit en conséquence, une indemnité de licenciement réduite de moitié lorsque le licenciement est prononcé pour insuffisance professionnelle (soit 2.552,46 euros).
Cet enseignant artistique saisit alors le juge administratif en vue d’une déclaration d’illégalité de ce licenciement pour insuffisance professionnelle, afin de caractériser une faute commise par la collectivité et obtenir une indemnisation de ce préjudice.
Dans un tel litige, le juge administratif doit vérifier, d’une part, la matérialité des faits qui ont motivé une telle décision ; d’autre part, dans le cas où lesdits faits seraient établis, de rechercher s’ils pouvaient justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle.
La collectivité établit la matérialité des faits par l’absence de participation des élèves de cet enseignant artistique à un événement musical et produit deux témoignages non-équivoques à propos du niveau des élèves sur le seul examen de fin de cycle de l’année 2012 : celui du directeur et celui d’un autre enseignant artistique, invité en tant que membre de jury, mais le témoignage de ce dernier n’est pas réalisé d’une façon spontanée puisqu’il a été explicitement livré à la demande dudit directeur.
Quant au requérant, il produit des preuves contraires par plusieurs témoignages et en particulier, ceux de deux autres directeurs d’écoles de musique pour lesquelles il est également employé en qualité d’enseignant artistique. Ces témoignages évoquent des compétences professionnelles certaines et des qualités pédagogiques. Par ailleurs, il se défend de tout désengagement au projet de concert en raison du trop faible niveau des élèves du premier cycle pour un tel projet et du manque de disponibilité des autres élèves qui avaient ainsi refusé d’y participer.
Le juge administratif en déduit, d’une part, que même si le niveau des élèves était insuffisant pour les élèves de fin de cycle lors de la seule année 2012, l’ensemble des productions ne sont pas de nature à caractériser une insuffisance professionnelle ; d’autre part, même si un désengagement dans ce projet était avéré, il ne peut, à lui seul, constituer un fait de nature à caractériser une insuffisance professionnelle.
En conséquence, le juge administratif condamne la commune à verser la somme de 12.052,46 euros à cet enseignant artistique en réparation des préjudices de toute nature qu’il a subis en conséquence de l’illégalité de ce licenciement pour insuffisance professionnelle et à 2.000,00 € au titre des frais irrépétibles (TA Toulon, 13 mai 2015, req. n° 1300576)